Saguenay, royaume des glaces : un hiver entre nature et traditions CANADA +

Depuis Québec, le trajet vers Saguenay (Chicoutimi/Arvida) s’effectue principalement par l’autoroute 73 nord (environ 230 km, ~2h30 sans arrêts). L’autoroute 73 et la route 175 sont entretenues l’hiver, mais mieux vaut consulter le site Québec 511 ou la radio (état des routes) avant le départ. Il est obligatoire de circuler avec des pneus d’hiver (du 1er décembre au 15 mars) et recommandé d’emporter des chaînes. Prévoyez de vous arrêter : par exemple Stoneham (boulangerie Pascal, chocolaterie Cœur fondant) ou la station-service/resto « L’Étape » sur la route 175, pour faire le plein et se restaurer. En cas de tempête, roulez prudemment, planifiez vos pauses et voyagez en journée si possible.

Activités hivernales incontournables

Nous arrivons dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean en plein cœur de l’hiver, enveloppés dans un décor de carte postale. Depuis notre passage à la frontière canadienne — où nous avons dû présenter nos passeports en cours de validité, ainsi qu’une autorisation AVE (pour les voyageurs en provenance de pays exemptés de visa) — nous avons pris soin de vérifier l’état des routes enneigées grâce aux services locaux (notamment Québec 511). Certains axes secondaires peuvent être difficilement praticables sans pneus neige ou chaînes, et l’usage d’un 4×4 s’est vite révélé précieux dans les secteurs les plus reculés.

Sur la route, nous avons eu la surprise de croiser l’un de ces fameux bus scolaires jaunes canadiens, un véritable symbole local qui tranche sur le blanc éclatant des paysages. Plus insolite encore, des engins motorisés à chenilles croisaient parfois notre route, rappelant à quel point l’hiver ici transforme tout. Des panneaux signalant la traversée des rennes — ou plus souvent des orignaux — ponctuent le parcours, nous rappelant que la nature règne ici en maître.

Nous avons posé nos valises à l’Auberge des 21, un petit hôtel familial situé à La Baie, non loin du centre de Chicoutimi et de ses services essentiels. L’accueil y a été des plus chaleureux : les chambres sont confortables, la literie douillette, et de grandes fenêtres donnent sur un paysage entièrement figé par le givre. Dans le salon commun, un feu de bois crépite, offrant une ambiance réconfortante après une journée dans le froid. Le petit déjeuner, copieux et fait maison, nous met parfaitement en condition pour affronter les températures mordantes. L’auberge propose également des forfaits hivernaux incluant des activités comme la raquette ou la motoneige, en partenariat avec des prestataires locaux.

Motoneige

Surnommé le paradis de la motoneige, le Saguenay–Lac-Saint-Jean compte 3 800 km de sentiers balisés, entretenus par 13 clubs fédérés. Avec une épaisseur de neige moyenne de 3 mètres, c’est un terrain de jeu extraordinaire. Nous enfourchons nos motoneiges — louées auprès de prestataires comme Saguenay Aventures, Équinox Aventure, ou Ferme 5 Étoiles — pour explorer les circuits mythiques : les Monts-Valin, le Tour du Fjord, la Grande boucle, ou encore la zone sauvage du 49e parallèle. Une licence FCMQ est obligatoire, et nous avons téléchargé l’appli iMotoneige pour suivre l’état des pistes en temps réel. Vêtus en couches multiples, cagoules sous le casque, bottes fourrées et mitaines chauffantes, nous sommes prêts à affronter le froid sec et intense du Québec.

Raquette

La région offre une myriade de sentiers de raquette en forêts et parcs. Les plus spectaculaires sont sans doute dans le Parc national des Monts-Valin (beaucoup de neige, panoramas grandioses) et le Parc national du Fjord-du-Saguenay (rive du Fjord, secteur Rivière-Éternité)On fait aussi de la raquette près des villes (p. ex. Parc de la Rivière-du-Moulin à Chicoutimi) et dans des centres plein air (Cap au Leste, Mont Édouard, Bec-Scie) Les locations de raquettes sont courantes, voire offertes dans les stations de ski; emportez guêtres et bâtons de ski pour plus de confort.Dans les Parcs nationaux des Monts-Valin et du Fjord-du-Saguenay, les randonnées en raquettes nous plongent dans un monde immobile et feutré. Les panoramas depuis les crêtes, couverts de neige, sont à couper le souffle. À Rivière-Éternité, nous marchons au bord du fjord gelé. À Chicoutimi, nous découvrons les sentiers du parc de la Rivière-du-Moulin, plus accessibles mais tout aussi enchanteurs. Des raquettes peuvent être louées un peu partout, et nous complétons notre équipement avec des guêtres et bâtons de marche pour plus de stabilité.

Traîneau à chiens

Moment magique au cœur de l’hiver : notre randonnée en traîneau à chiens. À la Ferme 5 Étoiles, à Sacré-Cœur, nous faisons connaissance avec les chiens, les aidons à les harnacher, puis partons à l’assaut de la forêt. Le silence n’est brisé que par les aboiements joyeux et le glissement des patins sur la neige. D’autres centres, comme Entre chien et loup ou Les Balades Solo à L’Anse-Saint-Jean, proposent aussi ces excursions féériques avec vue sur le fjord. Il est fortement conseillé de réserver à l’avance, surtout en haute saison.

Via ferrata

Le Parc national du Fjord-du-Saguenay propose une via ferrata sur les falaises de Baie-Éternité (secteur Le Fjord). Trois parcours (« Grande Dalle », « Passerelle », « Odyssée ») dévoilent le fjord du haut (escalier inversé, pont suspendu). Notez toutefois que la via ferrata n’est ouverte qu’en été (juin–oct.) et ne se pratique pas en janvier. En hiver, on se contente généralement de l’admirer depuis les belvédères ou de faire de l’escalade sur glace avec guides spécialisés.

Pêche blanche

Nous nous installons dans une cabane chauffée, posée directement sur la glace du fjord du Saguenay, pour une session de pêche blanche inoubliable. Le village de pêche au Lac-Kénogami, formé de dizaines de cabanes colorées, nous accueille dans une ambiance conviviale. Ici, nous pouvons pêcher morue arctique, sébaste, ou encore flétan du Groenland — des espèces marines capturées en eau douce grâce à la salinité du fjord. Au lac Saint-Jean, ce sont dorés, perchaudes et brochets qui peuplent les eaux gelées. Bonne nouvelle : aucun permis de pêche n’est requis sur le fjord. Des guides nous accompagnent, le matériel est fourni, et les chaufferettes ne sont pas un luxe !

Visites culturelles et patrimoniales

Même en hiver, le Saguenay-Lac-Saint-Jean propose du patrimoine et de la culture. Le Musée du Fjord (à Saint-Fulgence) est un incontournable toute l’année : aquarium géant, vivarium et multimédia font découvrir la faune du fjord et son histoire. La Pulperie de Chicoutimi – Musée régional relate, elle, plus de 100 ans d’industrie papetière locale (usine de pâte) dans son cadre historique. Non loin (à Roberval, Lac-Saint-Jean), le Village historique de Val-Jalbert reconstitue un village-machines du début XXe siècle (usine hydroélectrique, maisons d’époque, cascades figées). À Saguenay-ville et autour, on peut visiter la cathédrale Saint-François-Xavier (architecture gothique) ou l’église de Sainte-Rose-du-Nord (vue sur le fjord). Enfin, ne manquez pas « La Fabuleuse Histoire d’un Royaume Saguenay » (un spectacle multimédia en hiver sur l’histoire locale) ou encore les marchés de Noël et festivals hivernaux (Saguenay en neige, Festifrette, Hivernades…), qui animent la région même par temps froid

Au détour d’un sentier, nous apercevons des biches, des lièvres et parfois des renards roux qui traversent silencieusement la forêt. Lors des nuits claires, nous restons dehors, les yeux rivés au ciel, espérant voir danser les aurores boréales. Cette magie verte, insaisissable, vient parfois sublimer le silence glacé de l’hiver québécois.

Les Monts-Valin offrent parmi les plus beaux panoramas, notamment la célèbre Vallée des fantômes : les arbres y sont entièrement recouverts de givre, prenant des formes étranges et féériques. Autres lieux de contemplation : le Mont-Apica (884 m), le parc McLean à La Baie, ou le mont Jacob, belvédère urbain surplombant Saguenay. Les villages de Sainte-Rose-du-Nord et L’Anse-Saint-Jean charment avec leurs ponts couverts, églises de bois et petits cafés où il fait bon se réchauffer.

En hiver, le lac Saint-Jean devient un miroir blanc sans fin, sur lequel se dressent les cabanes du village de pêche de Roberval ou les sentiers du parc national de la Pointe-Taillon, gelé jusqu’à la baie de Vingt-Îles. Nous marchons, glissons, ou simplement restons immobiles, happés par ce vide lumineux, cette immensité silencieuse.

Ce voyage hivernal dans le Saguenay–Lac-Saint-Jean nous plonge dans un monde à part, entre aventures nordiques, traditions vivantes et nature brute. Ici, tout est blanc, tout est vaste, et tout semble respirer au ralenti, comme suspendu dans le gel. Et nous, emmitouflés, émerveillés, nous avons le sentiment d’y avoir trouvé un autre rythme, celui de l’hiver profond québécois.

Légendes et récits locaux

Le folklore saguenéen ajoute une touche mystique à l’aventure. Par exemple, une légende autochtone raconte l’exploit de Mayo, premier homme géant, qui aurait vaincu un énorme monstre-poisson (« morue du Saguenay ») sur la rive du fjord. Mayo frappa trois fois le crâne du monstre contre le Cap Trinité, creusant les fameuses entailles en escalier visibles encore aujourd’hui. Depuis, on dit que la Vierge Marie veille sur les lieux sacrés de ce combat mythique. D’autres contes parlent de « fantômes » dans la Vallée des fantômes (Monts-Valin) ou de tribus innues disparues le long du Saguenay; ces récits locaux sont parfois mis en scène dans des visites guidées ou des expositions muséales.

Informations pratiques

En hiver, le Saguenay est bien équipé : on y trouve épiceries ouvertes dans chaque quartier de Saguenay (Chicoutimi, Jonquière, La Baie) et dans les petites villes (Saint-Félicien, Dolbeau, etc.), ainsi que stations-service sur les routes principales. Les centres d’information touristique proposent cartes et conseils sur place. Pour les activités, la réservation anticipée est vivement recommandée (trail motoneige, traîneau, hébergement, etc.), car les meilleures plages horaires partent tôt. Côté équipement : emportez des vêtements chauds en plusieurs couches (sous-couche thermique, polar, veste et pantalon imperméables), bonnet, gants chauds (et mitaines), et des lunettes de soleil (le reflet sur la neige est intense). N’oubliez pas des chaufferettes pour les longues journées extérieures. Pour la motoneige, prévoyez également des assurances et la licence FCMQ, et informez quelqu’un de votre itinéraire. Enfin, consultez toujours la météo et les conditions routières (sites Québec 511 et météo Média) avant de partir : en cas de fortes tempêtes, les routes peuvent être temporairement ralentées ou fermées pour sécuriser le passage.

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