Cormoran à poitrine blanche Phalacrocorax lucidus +

Plus loin sur le lac Nokoué, lors de notre visite à Ganvié,au Bénin  nous avons également observé des cormorans à poitrine blanche (Phalacrocorax lucidus), perchés sur des branches. Ces oiseaux aquatiques, bien que moins colorés que les guêpiers ou les martins-pêcheurs, sont tout aussi fascinants et jouent un rôle essentiel dans l’écosystème lacustre. Leur silhouette sombre, souvent immobile, contraste avec le mouvement incessant des autres espèces, mais leur présence est tout aussi marquante.

Le cormoran à poitrine blanche est une espèce d’oiseau aquatique de la famille des Phalacrocoracidae, largement répandue autour des plans d’eau et des côtes en Afrique subsaharienne. Il est reconnaissable à son plumage noir intense, contrasté par une poitrine et une gorge blanches, une caractéristique distinctive qui lui vaut son nom. Son bec, long et crochu à l’extrémité, est parfaitement adapté à la capture des poissons, sa principale source de nourriture. Ses yeux verts perçants lui confèrent un regard intense, et ses pattes palmées lui permettent de nager avec agilité. Les juvéniles, plus ternes, affichent des teintes brunâtres et une poitrine moins marquée, mais leur silhouette reste facilement reconnaissable.

Cet oiseau mesure généralement entre 80 et 100 cm de longueur, avec une envergure impressionnante de 130 à 160 cm. Lorsqu’il est en quête de nourriture, il plonge souvent à des profondeurs significatives et peut rester sous l’eau pendant une minute ou plus, poursuivant ses proies avec une grande agilité. À Ganvié, nous l’avons souvent vu émerger brusquement des eaux du lac Nokoué, tenant un poisson entre son bec puissant avant de le gober d’un coup sec.

Dans cette cité lacustre où l’eau est omniprésente, les cormorans trouvent un habitat idéal. Le lac Nokoué leur offre une abondance de poissons et de nombreux perchoirs naturels ou artificiels. Nous les avons souvent observés posés sur des piquets de bois dépassant de l’eau, les ailes grandes ouvertes pour sécher au soleil. Contrairement à de nombreux autres oiseaux aquatiques, les cormorans n’ont pas de glandes uropygiennes très développées pour imperméabiliser leurs plumes, ce qui les oblige à sécher leurs ailes après la plongée.

Leur technique de chasse est fascinante. Ils plongent avec une aisance surprenante, disparaissant sous la surface pendant de longues secondes avant de resurgir avec une proie entre le bec. Leur régime alimentaire, principalement constitué de poissons, comprend aussi quelques crustacés et amphibiens. Ce comportement est particulièrement impressionnant à observer, surtout lorsqu’ils pêchent en groupe, plongeant et remontant à la surface presque simultanément.

Les cormorans à poitrine blanche sont des oiseaux grégaires. Ils se regroupent souvent en larges colonies, aussi bien pour la pêche que pour le repos. À Ganvié, nous avons remarqué leur habitude de se percher en groupes sur les branches mortes ou les structures en bois des villages flottants. Lorsqu’ils ne chassent pas, ils passent de longues minutes à lisser leur plumage ou à interagir avec leurs congénères à coups de hochements de tête ou de cris rauques et gutturaux.

Leur reproduction suit un cycle bien organisé. Ils nichent en colonies, souvent sur des arbres ou des falaises proches de l’eau, construisant leurs nids avec des branches et des herbes sèches. La femelle pond en moyenne entre deux et quatre œufs, que les deux parents incubent à tour de rôle pendant environ un mois. Les jeunes, nourris par régurgitation, restent au nid plusieurs semaines avant d’oser leur premier vol.

Nous avions déjà croisé le cormoran à poitrine blanche avant notre arrivée à l’embarcadère du Parc National de Djoudj , au Sénégal, où il était particulièrement abondant. Nous l’avons également observé lors d’une sortie en bateau  dans le Delta du Saloum,, où il partageait son habitat avec de nombreuses autres espèces d’oiseaux aquatiques.

Au-delà de Ganvié et du Sénégal, nous savons que cette espèce est également présente au lac de Samaya, à Kindia, en Guinée. Ce lac offre un habitat idéal pour ces oiseaux grâce à ses eaux poissonneuses et ses berges propices à la nidification. Leur présence dans ces différents écosystèmes souligne leur grande adaptabilité et leur rôle écologique crucial.

En plus de leur importance dans la régulation des populations de poissons, les cormorans à poitrine blanche sont un indicateur de la santé des milieux aquatiques qu’ils fréquentent. Pour les habitants de Ganvié et des autres régions où nous les avons observés, ils font partie intégrante du paysage quotidien. Leur observation, que ce soit au lac Nokoué, au lac de Samaya ou dans les eaux sénégalaises, nous rappelle à quel point ces oiseaux sont un maillon essentiel des écosystèmes qu’ils occupent.