Bulbul à oreillons rouges Pycnonotus nigricans nigricans
L’observation de deux individus de Pycnonotus nigricans nigricans — le Bulbul à oreillons rouges — réalisée dans l’enceinte du Epupa Falls Lodge (région du Kunene, nord-ouest de la Namibie), apporte un éclairage intéressant sur les variations écologiques et comportementales de cette espèce typique des savanes arbustives d’Afrique australe. Les oiseaux ont été repérés à proximité immédiate de la piscine, perchés dans la strate arbustive moyenne, à l’ombre des grands palmiers Hyphaene petersiana et des figuiers riverains (Ficus sycomorus), dans un environnement influencé par le microclimat humide du fleuve Kunene.
Le Bulbul à oreillons rouges (Pycnonotus nigricans), membre de la famille des Pycnonotidae, est une espèce largement distribuée dans les régions semi-arides du sud-ouest africain, depuis le sud de l’Angola jusqu’au nord de l’Afrique du Sud, en passant par la Namibie et le Botswana. La sous-espèce nominale, P. n. nigricans, occupe la frange occidentale de cette aire, adaptée aux milieux plus secs et aux zones de ripisylve clairsemée. Elle se distingue des formes orientales, notamment P. n. superior, par un plumage plus pâle, un ventre gris clair et un contraste plus marqué entre la tête noire et le corps gris-brun. L’anneau périoculaire rouge-orangé vif, la tache jaune sous-caudale et le bec noir légèrement recourbé complètent son profil distinctif.
À Epupa Falls, les deux individus observés présentaient des caractères conformes à cette sous-espèce, mais avec certaines nuances phénotypiques notables. Leur plumage apparaissait légèrement plus uniforme, le contraste tête-corps atténué, et la tache jaune sous-caudale moins saturée. Ces variations pourraient être interprétées comme une réponse à la luminosité diffuse et au microclimat plus humide du site, qui favorisent une moindre sélection pour les contrastes visuels liés à la thermorégulation ou à la communication interspécifique.
Le comportement observé s’écarte également du modèle typique de l’espèce, généralement vocalisante, active et territoriale. Ici, les bulbuls se montraient particulièrement calmes : déplacements lents, vocalisations rares et basse intensité d’activité sociale. L’absence de chants territoriaux ou d’interactions agonistiques laisse supposer une phase de repos post-reproductrice ou une adaptation comportementale au contexte de forte chaleur et d’humidité riveraine. Leur posture d’observation prolongée, à mi-ombre, témoigne de la capacité thermorégulatrice du groupe — les Pycnonotidae régulent leur activité quotidienne selon la disponibilité des zones d’ombre et la température ambiante.
D’un point de vue trophique, Pycnonotus nigricans est omnivore opportuniste, consommant à parts variables des fruits charnus (notamment Grewia, Ficus, Ziziphus), des insectes et parfois des fleurs. À Epupa, la proximité du fleuve favorise la disponibilité de ressources végétales et d’invertébrés aquatiques, ce qui pourrait expliquer la présence régulière de l’espèce dans les jardins arborés des lodges. Les bulbuls jouent ainsi un rôle écologique fonctionnel important, contribuant à la dispersion des graines et au contrôle des populations d’insectes.
Du point de vue biogéographique, l’observation d’individus apparemment plus ternes et moins actifs s’inscrit dans un gradient de variabilité intra-spécifique déjà documenté le long du bassin du Kunene. Des différences similaires ont été rapportées dans les populations de Kaokoland et du Damaraland, suggérant une plasticité phénotypique influencée par les conditions locales d’humidité et d’exposition.
Ainsi, les bulbuls d’Epupa Falls illustrent la souplesse écologique et comportementale de l’espèce, capable d’ajuster sa physiologie et ses activités à des contextes microclimatiques spécifiques. Leur présence discrète dans ce corridor de verdure semi-tropical, en bordure de désert, traduit la réussite d’une espèce généraliste dans un environnement de transition. En observant ces deux individus, calmes et silencieux sous les palmiers, on perçoit à la fois la résilience adaptative du genre Pycnonotus et la richesse écologique du biotope d’Epupa, où les chutes grondantes du Kunene abritent, paradoxalement, l’une des avifaunes les plus paisibles du nord namibien.
🐦 Tableau mis à jour des bulbuls africains et apparentés, avec observations de terrain
| Nom commun | Nom scientifique | Sous-espèce / Forme | Répartition | Traits distinctifs | Observation VERHEGGEN |
|---|---|---|---|---|---|
| Bulbul des jardins | Pycnonotus barbatus | barbatus (forme nominale) | Sénégal, Mali, Burkina Faso | Tête noire, ventre clair, sous-caudales jaune vif | ✅ Cap Skirring (Sénégal) individu observé près de la piscine |
| Pycnonotus barbatus inornatus | inornatus | Togo, Ghana, Bénin, sud Nigeria | Tête brun foncé, huppe discrète, plumage plus terne | ✅ Agbodrafo(Togo) une petite colonie de bulbuls des jardins | |
| gabonensis | Sud Cameroun, Gabon | Plumage plus terne, cri doux | 🔲 Non observée | ||
| arsinoe | Tchad, vallée du Nil | Ventre gris pâle, huppe courte | 🔲 Non observée | ||
| schoanus | Éthiopie, Érythrée | Plumage contrasté, vocalisations flûtées | 🔲 Non observée | ||
| dodsoni | Kenya, sud-est Éthiopie | Tête noire, sous-caudales jaune vif | 🔲 Non observée | ||
| layardi | Zambie, Zimbabwe, Afrique du Sud | Tête sombre, huppe absente, cri modulé | 🔲 Non observée | ||
| Bulbul à calotte sombre | Pycnonotus tricolor | — | Angola, Zambie, Botswana, Afrique australe | Tête brun foncé, pas de huppe, sous-caudales jaunes | ✅ Cabo Ledo (Angola) sur une branche surplombant la baie |
| Bulbul malgache | Hypsipetes madagascariensis | — | Madagascar (forêts sèches et humides) | Tête noire huppée, bec orange, chant flûté | ✅ Parc d’Ankarafantsika (Madagascar) perché sur une branche sur le Circuit Coquereli |
| Bulbul à oreillons rouges | Pycnonotus nigricans | — | Namibie, Angola, Botswana, Zimbabwe, Afrique australe | Tête noire, anneau rouge-orange autour de l’œil, sous-caudales jaunes, chant varié | ✅ Epupa Falls Lodge (Namibie) : deux individus perchés près de la piscine, comportement curieux et vocalisations discrètes |
| Bulbul à ventre rouge | Pycnonotus cafer | — | Introduit localement (rare en Afrique) | Tête noire, sous-caudales rouges, dos brun écaillé | 🔲 Non observée |
| Bulbul à gorge jaune | Chlorocichla flavicollis | — | Afrique centrale et occidentale | Gorge jaune, dos olive, chant flûté | 🔲 Non observée |
| Bulbul criard | Bleda syndactylus | — | Afrique de l’Ouest et centrale | Grand, cri rauque, plumage brun-olive | 🔲 Non observée |
🧭 Notes sur Hypsipetes madagascariensis
- Endémique de Madagascar, présent dans les forêts sèches du nord-ouest, y compris Ankarafantsika
- Tête noire huppée, bec orange vif, corps brun-gris
- Vocalisations flûtées, souvent en duo ou petit groupe
- Habitat : forêts sèches semi-caduques, zones ripicoles, lisières boisées