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Sterne d’Afrique Thalasseus albididorsalis · Sterne royale d’Afrique, Sterne à dos pâle

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Au cœur de la Réserve de biosphère de la Bouche du Roi, au Bénin, là où le fleuve Couffo rencontre l’océan Atlantique, se déploie un sanctuaire vital pour une biodiversité remarquable. Parmi les trésors de ce paysage de lagunes, de plages et de mangroves, la Sterne d’Afrique (Thalasseus albididorsalis) incarne à la fois l’élégance et les mystères de l’ornithologie.

Ce grand oiseau marin, reconnaissable à son bec orange vif et à sa crête noire hirsute lors de la saison nuptiale, a longtemps été confondu avec la Sterne royale (Thalasseus maximus). Ce n’est qu’en 2020, après des études génétiques révélant sa parenté avec la Sterne voyageuse (Thalasseus bengalensis) et la Sterne huppée (Thalasseus bergii), qu’elle fut officiellement reconnue comme espèce à part entière par les ornithologues. Ses autres noms, Sterne royale d’Afrique ou Sterne à dos pâle, évoquent son plumage gris clair et son statut d’emblème des côtes ouest-africaines.

Avec une envergure pouvant atteindre 135 cm et un poids moyen de 367 g, la Sterne d’Afrique se distingue par ses contrastes saisissants : un ventre immaculé, des ailes aux rémives bordées de noir, et des pattes noires chez l’adulte. En dehors de la période de reproduction, sa crête reste le seul rappel de sa parure nuptiale, tandis que les juvéniles arborent un plumage strié, un bec jaune pâle et des pattes souvent verdâtres ou roses. Contrairement à la Sterne arctique, qui chasse en planant avant de plonger, elle préfère des attaques directes, fendant l’air pour saisir poissons et crevettes dans les eaux peu profondes. Harengs, mulets et carangues figurent parmi ses proies favorites, faisant des zones côtières comme la Bouche du Roi un garde-manger privilégié.

Si ses sites de nidification confirmés se limitent à quelques îles entre la Mauritanie et la Sénégambie, des indices laissent penser qu’elle pourrait nicher jusqu’au Nigeria. Hors reproduction, elle parcourt les côtes du Maroc à la Namibie, ce qui explique sa présence occasionnelle au Bénin, en marge de son aire habituelle. Ici, les bancs de sable isolés et les vasières riches en nutriments attirent peut-être des individus égarés ou en quête de nouvelles zones d’alimentation. Mais cette dépendance aux habitats côtiers la rend vulnérable : l’érosion, la montée des eaux ou le dérangement humain menacent ses refuges, d’autant que l’UICN n’a pas encore évalué son statut de conservation, une lacune qui souligne l’urgence d’études approfondies.

Pour ceux qui espèrent l’apercevoir ici, entre avril et septembre, la discrétion est de mise. Équipés de jumelles, mieux vaut éviter les mouvements brusques près des lagunes, où son cri perçant pourrait trahir sa présence. Bien que rare dans cette région, chaque observation rappelle que la Bouche du Roi, classée réserve de biosphère, est bien plus qu’un écosystème : c’est un chapitre vivant de l’histoire naturelle de l’Afrique de l’Ouest, où chaque battement d’aile raconte une évolution, une adaptation, ou une fragile résilience face aux bouleversements du monde.

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