Dolisie, poumon vert du Niari CONGO +
DOLISIE
Entourée de collines verdoyantes et blottie aux lisières de la grande forêt du Mayombe, Dolisie — anciennement appelée Loubomo — déploie une énergie tranquille, presque insaisissable. Vue depuis les hauteurs, elle semble à la fois contenue et vaste, une ville-charnière entre le monde forestier et les grandes plaines du Niari.
C’est en milieu de matinée que nous quittons notre hébergement aux Mess Caps, attirés par l’envie de sentir battre le pouls de la ville. La lumière douce du matin caresse les façades patinées du centre-ville, vestiges d’une architecture coloniale où l’on perçoit encore le souci d’alignement et d’aération d’une ancienne station climatique. Dolisie n’est pas immense, mais elle respire, elle palpite — dans ses avenues plantées d’arbres, dans ses places animées, dans ses marchés débordants d’activité.
À pied, nous nous dirigeons vers le sud, en direction de la rivière Nkodo. Pour cela, nous laissons la voiture à proximité du marché Passi Ngolo, vaste labyrinthe où se mêlent odeurs de gingembre frais, éclats de voix, couleurs chatoyantes de pagnes et cliquetis de casseroles. Des femmes souriantes vendent des régimes de bananes, du poisson fumé, des cossettes de manioc, tandis que des hommes chargent des sacs de charbon ou de farine sur des charrettes brinquebalantes.
Nous quittons l’agitation du marché pour emprunter un sentier de latérite qui serpente vers la rivière. Les passants nous saluent avec chaleur — grands sourires, « bonjour le blanc ! », mains levées —, nous indiquant le chemin d’un geste avenant. Au détour d’un carrefour, nous faisons la rencontre d’Armand, un homme affable d’une cinquantaine d’années. Ancien instituteur, puis journaliste, il est désormais responsable d’un service social local. Curieux de notre présence, il nous interroge d’abord avec prudence : que faisons-nous ici ? Sommes-nous venus pour une ONG, pour un reportage ? Très vite, notre sincérité désarme sa méfiance. Il comprend que nous ne sommes ni enquêteurs ni humanitaires, juste des voyageurs désireux de comprendre ce pays de l’intérieur.
Lors de notre ballade nous avons observé un cordonbleu d’Angola Uraeginthus angolensis ,une espèce de passereau appartenant à la famille des Estrildidae. Cet oiseau mesure environ 11,5 cm de longueur. Il ressemble beaucoup au Cordonbleu à joues rouges que nous avions observé au Sénégal mais sans la coloration rouge caractéristique de cette espèce et d’un bleu beaucoup plus vif. La femelle avec les parties inférieures beiges ressemble beaucoup aux autres femelles de ce genre mais présente un bec rose plus vif. Celui du mâle est rouge avec l’extrémité noire. Les yeux sont marron et les pattes brun clair.

Il nous conduit jusqu’à la berge de la rivière Nkodo, étroite mais vive, bordée d’herbes hautes, de papayers et de manguiers. Là, Armand nous parle à cœur ouvert. Il évoque la vie quotidienne à Dolisie, les difficultés économiques, le chômage massif, la jeunesse livrée à elle-même, les ravages silencieux de l’alcool et de la drogue, surtout chez les adolescents. Il parle aussi des routes défoncées, des écoles en manque de matériel, du rêve toujours lointain d’un avenir meilleur. Il nous dit tout cela sans plainte, mais avec lucidité. C’est une fenêtre franche, sans fard, sur le Congo d’aujourd’hui.
Nous le remercions longuement avant de reprendre la route du centre. Sur notre chemin, nous faisons halte au grand marché couvert, un bâtiment à étages aussi démesuré qu’inachevé. À l’intérieur, les étals s’enchevêtrent sous des toits de tôle, les vendeurs crient leurs prix au-dessus du brouhaha. On y trouve de tout : légumes, viande, savon artisanal, appareils électroniques, ustensiles de cuisine, bottes en plastique. C’est un monde en soi, grouillant, dense, labyrinthique. On s’y perd facilement, mais on y découvre mille petites scènes de vie.
Plus loin, une halte s’impose à l’église Notre-Dame, imposante silhouette blanche qui surplombe une place poussiéreuse. Dans le calme de son enceinte, quelques fidèles viennent prier ou se reposer sur les bancs en bois. L’ambiance contraste fortement avec l’agitation extérieure. La lumière filtrée par les vitraux donne aux murs un éclat doré, presque surnaturel.
Avant le déjeuner, pris d’une envie d’explorer plus loin, nous prenons la route vers un lieu emblématique de la région : le Lac Bleu, situé à quelques kilomètres de la ville. La piste qui y mène traverse des collines boisées, où apparaissent parfois des scieries, témoins de l’exploitation forestière qui a valu à Dolisie son surnom de « capitale de l’or vert ». Le lac, lové dans un cratère, est célèbre pour ses reflets turquoise intenses par temps clair. Mais aujourd’hui, le soleil joue à cache-cache derrière une couverture nuageuse, et les couleurs du lac, bien que belles, n’atteignent pas leur splendeur habituelle. Le paysage reste néanmoins spectaculaire, apaisant, avec le chant des oiseaux et le bruissement du vent dans les arbres.
Cascade de Madiaba, cascade oubliée du grand Niari
Le lendemain, un dimanche matin baigné de lumière, nous quittons Dolisie avec l’envie d’explorer les alentours. Notre objectif du jour : rejoindre les chutes de Madiaba, nichées quelque part dans les profondeurs du département du Niari.
Pleins d’enthousiasme, nous suivons les indications de Google Maps qui, une fois de plus, se révèlent capricieuses. Après Mikokoti, la route goudronnée s’efface, remplacée par une piste poussiéreuse, sinueuse, qui s’enfonce dans une savane broussailleuse. D’abord praticable, la voie devient bientôt trop étroite, envahie par les herbes hautes, les termitières et des fourrés épais. Les arbres paraissent s’être concertés pour barrer le passage. L’illusion de pouvoir continuer s’évanouit au détour d’un virage, et nous rebroussons chemin, quelque peu frustrés.
Sous l’écorce du temps : l’arbre de Brazza, géant silencieux de Dolisie
À huit kilomètres au sud du centre-ville de Dolisie, juste avant le poste de péage sur la route de Pointe-Noire, un géant paisible attire le regard des voyageurs. Immobile depuis des siècles, il semble veiller sur la route et ses passants. Il ne s’agit pas d’un monument construit par la main de l’homme, mais d’un arbre — un baobab colossal, surnommé l’arbre de Brazza, dont la silhouette majestueuse tranche sur le paysage verdoyant.
Ce baobab, emblématique et mystérieux, tient sa renommée d’un épisode légendaire, à la frontière entre l’histoire et le mythe. On raconte que Pierre Savorgnan de Brazza, explorateur français et figure controversée de la colonisation en Afrique centrale, s’y serait un jour arrêté, épuisé, pour y trouver un peu d’ombre et de répit. À cette époque, la région n’était encore qu’un vaste territoire de forêts, de pistes et de villages. La légende dit que c’est sous ce baobab, dont le tronc immense forme presque un abri naturel, que l’explorateur aurait fait une sieste réparatrice.
Vrai ou non, cet épisode a suffi à ancrer ce baobab dans l’imaginaire collectif. Il est devenu un lieu de mémoire, de passage et d’expression. En s’en approchant, on est frappé par sa hauteur impressionnante et par la puissance tranquille qu’il dégage. Son tronc, large de plusieurs mètres, porte les traces visibles de son lien avec les hommes. L’écorce est marquée de centaines de gravures, des noms, des dates, des messages d’amour ou de revendication, certains anciens et presque effacés, d’autres plus récents, encore nets. C’est un palimpseste vivant, une sorte de livre ouvert où plusieurs générations ont laissé leur trace.
Parmi les inscriptions les plus anciennes, on peut lire les noms de fonctionnaires coloniaux, de soldats français ou encore de voyageurs européens passés par là à la fin du XIXe siècle ou au début du XXe. Certains y ont inscrit leurs noms, leurs initiales, et la date de leur passage – « G. Dumont – 1897 », « Lieutenant B. – 1903 » –, parfois accompagnés d’une mention brève comme « arrivé à pied de Loango » ou « mission jusqu’à Brazzaville ». Ces traces témoignent des premiers contacts européens avec l’intérieur du pays, à une époque où la route entre la côte et les terres centrales était encore un long périple à pied ou à cheval.
D’autres gravures, plus touchantes ou intrigantes, semblent venir de soldats africains enrôlés de force, ou d’anciens cheminots qui travaillaient sur la ligne du chemin de fer Congo-Océan. On peut y lire des prénoms, des proverbes, des dates, parfois même des mots en langues locales ou des symboles mystérieux. Certains messages sont plus récents, gravés dans les années 1960 ou 1970, période d’intenses déplacements entre Pointe-Noire et l’intérieur, à l’époque de la construction des grands axes routiers.
Sous ses branches épaisses, l’air est plus frais, presque silencieux. Des oiseaux s’y réfugient, des enfants viennent y jouer, des anciens s’y retrouvent parfois pour discuter à l’ombre. Des visiteurs de passage s’arrêtent pour prendre des photos, poser la main sur son écorce rugueuse, ressentir le poids du temps. Car ce baobab n’est pas seulement un arbre. Il est un témoin. Témoin des changements de la région, des mouvements de population, du bitume qui a remplacé la piste, du va-et-vient incessant entre Pointe-Noire et Dolisie.
L’arbre de Brazza suscite aussi des débats : certains questionnent la véracité de l’anecdote liée à l’explorateur. Aucun document officiel ne confirme qu’il s’y soit vraiment arrêté. Pourtant, ce détail importe peu. Ce que les habitants racontent et ce que les visiteurs ressentent suffisent à nourrir l’aura du lieu. Ce baobab incarne à la fois la mémoire coloniale, la résilience des traditions orales, et la relation intime entre l’homme et la nature en Afrique centrale.
Avec le développement de la région, le site gagnerait à être mieux protégé et mis en valeur. Une signalisation touristique, une mise en sécurité des abords, voire un panneau explicatif, permettraient de préserver ce patrimoine vivant sans le figer. Car si l’arbre de Brazza appartient à tous, il reste d’abord l’enfant d’une terre — celle du Niari, riche en légendes, en forêts, en récits oubliés.
FAUNE ET FLORE
J 1108 CORDONBLEU D’ANGOLA Uraeginthus angolensis DOLISIE NIARI CONGO
J 1108 Belonogaster juncea RESTAURANT PK150 DOLISIE NIARI CONGO
J 1109 Cichladuse à queue rousse Cichladusa ruficauda MESS CAPS DOLISIE NIARI CONGO
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LES LOGEMENTS
MESS CAPS
À notre arrivée à Dolisie, après avoir roulé depuis Brazzaville à bord de notre Raptor, puis fait escale à Nkayi, nous découvrons le Mess CAPS, dissimulé derrière une façade sobre mais soignée. L’endroit ne paie pas de mine au premier regard, mais il suffit de franchir le seuil pour pénétrer dans un petit havre de paix niché au cœur de la ville.
La réception, baignée de lumière, s’ouvre d’un côté sur une salle de restaurant conviviale, et de l’autre sur un espace détente inattendu : une piscine de taille modeste mais d’une propreté irréprochable, entourée de carrelage clair et de quelques transats. À proximité, un baby-foot invite à des parties endiablées, tandis qu’un petit salon lounge, meublé de fauteuils en osier, prolonge l’atmosphère de repos. Une cabane surélevée en bois, au toit de tôle ondulée, trône au fond du jardin : les enfants l’adoptent aussitôt comme base d’observation, tandis que les adultes y voient un perchoir agréable pour lire ou discuter à l’ombre.
Nos deux chambres, réservées pour trois nuits (120 000 FCFA au total), se trouvent dans un bâtiment voisin, à quelques pas du parking. À l’ouverture de la porte, une sensation immédiate de fraîcheur et de confort nous enveloppe. Les lits king-size, impeccablement faits, trônent au centre de la pièce. Les draps , repassés avec soin, contrastent avec les boiseries sombres de l’armoire spacieuse. Chaque chambre est équipée d’un coin bureau discret mais fonctionnel, idéal pour étudier cartes ou récits de voyage. La climatisation, silencieuse et efficace, promet des nuits paisibles.
Dans la salle de bains, le carrelage clair reflète la lumière naturelle. La douche à l’italienne offre une pression d’eau généreuse – un luxe que nous n’apprécions que mieux après la chaleur de la route. Les serviettes, épaisses et moelleuses, sont accompagnées de petits savons artisanaux à base d’huiles locales. Un large miroir au cadre en bois complète cet espace simple mais soigné, pensé pour le confort sans excès.
Le rez-de-chaussée du Mess CAPS réserve d’autres agréments. Un patio ombragé, au mobilier de rotin patiné par les ans, accueille nos fins d’après-midi. Nous y sirotons des jus de bissap ou des sodas locaux tout en laissant filer le temps, bercés par le bruissement lointain de la ville.
Les murs sont décorés de photographies anciennes de Dolisie, et de portraits en noir et blanc de l’ancien propriétaire des lieux – autant de clins d’œil à l’histoire congolaise qui donnent à l’endroit une âme discrète mais bien présente.
Grâce à son emplacement central, le Mess CAPS nous permet de partir à pied explorer les rues de Dolisie. Entre les échoppes de tailleurs, les vendeurs de fruits installés sous des parasols en toile délavée, et les petits marchés couverts, chaque promenade devient un prétexte à la découverte. Le soir, nous retrouvons toujours avec plaisir notre paisible retraite, ravis de savourer un dîner servi avec simplicité mais préparé avec soin, à base de produits locaux.
Ce logement, pratique sans être impersonnel, confortable sans être ostentatoire, et sincèrement accueillant, s’impose comme le point de chute parfait pour goûter les charmes discrets de Dolisie, au rythme tranquille et chaleureux de la vie congolaise.
LES LIENS VERS LES PHOTOS
J 1107 Piste de Dolisie, poumon vert du Niari CONGO
TENTATIVE DE REPARATION DE NOTRE SYSTEME DE FREINS A BRAZZAVILLE
LES LIENS
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À peine les roues de notre avion effleurent-elles le tarmac brûlant de 

d’un manguier, des brochettes fument sur un grill de fortune, entourées de rires et de conversations animées.
ITINERAIRE








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