Gorille des plaines de l’ouest – Gorille de l’Ouest Gorilla gorilla +

Le gorille de l’Ouest (Gorilla gorilla), parfois appelé simplement « gorille » ou « gorille des plaines de l’Ouest », appartient, avec le gorille de l’Est (Gorilla beringei), au genre Gorilla de la famille des hominidés. Il se rencontre à l’état sauvage dans les forêts tropicales humides et marécageuses du Cameroun, du Gabon, de la Guinée équatoriale, de la République du Congo, du Nigeria et de la province angolaise de Cabinda ; il a disparu de la République démocratique du Congo. Sa répartition, fragmentée par des cours d’eau comme l’Ogooué, inclut deux populations majeures : la plus vaste, dite « des plaines », et celle du gorille de la rivière Cross, limitée aujourd’hui à moins de 200 individus.

Le mâle atteint jusqu’à 1,70 mètre pour environ 180 kg dans la nature (jusqu’à 230 kg en captivité, où son activité est plus réduite et sa nourriture mieux contrôlée), tandis que la femelle mesure jusqu’à 1,30 mètre pour 70 kg. Ses bras, plus longs que ses jambes, et sa poitrine large lui donnent une carrure puissante ; sa peau sombre contraste avec un pelage plutôt clair et court : chez l’adulte, les poils argentés vont de la nuque jusqu’à la croupe et, parfois, jusqu’au sommet des pieds, alors que chez le gorille de l’Est cette bande s’arrête à mi-dos. Son front porte parfois des reflets rouge à brun, tandis que son visage, dépourvu de poils, dégage une impression de sagesse tranquille.

Essentiellement végétarien, il consacre la majeure partie de ses journées à brouter feuilles, baies, fougères et écorces ; il complète son régime par des champignons, des racines et, à hauteur de 10 %, des petits invertébrés – insectes, escargots, parfois grenouilles – voire des œufs ou de jeunes rongeurs. Omnivore opportuniste, il ne dédaigne pas non plus quelques tubercules. Pour traverser une zone inondée, on l’a même vu sonder la profondeur de l’eau à l’aide de bâtons, preuve d’une capacité d’utilisation d’outils.

La maturité sexuelle survient vers 10 ans pour la femelle et 15 ans pour le mâle ; le cycle menstruel dure environ 28 jours. Après une gestation de neuf mois, la femelle met bas un unique petit de près de 2 kg, qu’elle nourrit et porte constamment pendant trois à quatre ans. Le père, s’il n’interagit guère avec son fils ou sa fille, assure la défense du groupe contre les mâles rivaux. En liberté, l’espérance de vie atteint 35 à 40 ans.

Sa population totale est estimée entre 80 000 et 100 000 individus, dont l’essentiel appartient aux plaines de l’Ouest ; malgré ces chiffres, le gorille de l’Ouest figure parmi les primates africains les plus menacés, victime de la déforestation, du braconnage et des maladies. Confronté à la destruction rapide de son habitat, il dépend désormais d’une mobilisation internationale pour renforcer la protection légale des forêts, créer des corridors écologiques et sensibiliser les populations locales à sa sauvegarde.

Nous sommes heureux de pouvoir à nouveau observer le comportement des gorilles des plaines dans le sanctuaire aux grands singes de Mefou, niché dans la forêt secondaire à quelques kilomètres de Yaoundé au Cameroun. Dans cet espace protégé, géré avec passion par la fondation Ape Action Africa, les gorilles rescapés du braconnage ou du trafic illégal retrouvent peu à peu une vie sociale structurée, dans des enclos vastes et densément boisés, recréant les conditions de leur habitat naturel.

À Mefou, ce sont souvent les sons qui annoncent leur présence avant même de les apercevoir : un craquement de branches, un souffle sourd, un grondement profond. Et puis, soudain, un mouvement dans la clairière, et le roi des lieux surgit. Un mâle au dos argenté, imposant, magistral, dont la présence impose naturellement le silence. Sa poitrine large, son crâne bombé et ses longs bras témoignent d’une force herculéenne, mais c’est son regard, posé et intense, qui saisit. Il vous traverse, presque humain, presque trop humain.

Notre premier face-à-face avec un mâle gorille des plaines remonte au  Limbé Wildlife Centre, en lisière de la forêt tropicale du sud-ouest camerounais. Perchés sur une plateforme d’observation, nous étions séparés de lui par quelques mètres à peine et une épaisse clôture. Il se tenait immobile, souverain, le pelage brun-roux marqué d’une large bande argentée courant sur son dos. Il semblait contempler le monde avec un calme ancien, comme s’il avait traversé des siècles.

Nous l’avons vu se mouvoir par de petits pas appuyés sur ses poings – cette démarche caractéristique des gorilles, la fameuse « marche sur les jointures ». Il avançait lentement, chaque geste empreint de prudence et de puissance contenue. Il s’est accroupi sous une branche basse pour cueillir une pousse tendre, qu’il a portée à sa bouche avec une délicatesse inattendue. Ses lèvres mobiles, ses molaires puissantes, sa langue agile — tout en lui disait : maîtrise.

Autour de lui, les femelles vaquaient, occupées à toiletter les jeunes, à jouer, à gronder doucement, comme pour maintenir l’équilibre social du groupe. Cette scène de la vie quotidienne des gorilles nous a profondément marqués. Elle révélait un monde complexe, fait de hiérarchies subtiles, d’émotions et de communication — un microcosme de la forêt équatoriale, qu’ils incarnent autant qu’ils le protègent.

Chaque observation renforce notre admiration pour ces géants doux, véritables gardiens de la canopée, si vulnérables face à la déforestation, au braconnage et aux maladies. À travers eux, c’est toute la forêt qui s’exprime — et c’est à nous de la défendre. C’est pourquoi nous saluons le travail remarquable de centres comme Mefou et Limbé, qui non seulement sauvent des vies, mais recréent des espoirs de réintégration dans le milieu naturel, à long terme. Ces sanctuaires sont bien plus que des refuges : ce sont des bastions d’avenir pour les grands singes d’Afrique.